[TOP] Qui es-tu Marilyn Monroe ?

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On ne compte plus le nombre de fictions, de documentaires et de livres revenant sur la vie – et surtout la mort tragique et énigmatique – de Marilyn Monroe. Il y a quelques mois encore, Netflix présentait Blonde d’Andrew Dominik, adaptation libre du roman ultra romancé du même nom de Joyce Carol Oates (2000). De son côté, pour célébrer les soixante ans de la mort de l’actrice, la Cinémathèque Française proposait du 30 novembre au 19 décembre 2022 une rétrospective de la carrière de l’actrice américaine, une occasion idéale pour découvrir ou redécouvrir une carrière trop souvent réduite à quelques films et rumeurs de tournage. Alors que nous fêtons cette année les quatre-vingt dix sept ans de sa naissance, nous voulions profiter de ce jour spécial pour vous parler de nos films préférés avec cette actrice célèbre. 
Trop souvent encore, elle se retrouve réduite à une blonde platine, d’une sex-symbol “écervelée”. Cette image, Monroe a participé à sa construction, sans doute malgré elle. Mais, ne retenir que cela de l’actrice, c’est mettre de côté la carrière passionnante d’une femme qui a tourné pour d’immenses réalisateurs et avec les meilleurs acteurs. C’est oublier aussi qu’elle excellait dans la comédie tout autant que dans le drame.

Marilyn Monroe était un personnage, un visage, une voix envoutante. Elle était aussi Norma Jean Mortenson, une jeune femme pleine de rêve. Née en juin 1926, elle a côtoyé les plus grands et plus grandes de son temps, avant d’en devenir une également. C’est une actrice de talent à laquelle nous avons souhaité rendre hommage avec ce top de nos films fétiches, classés non pas par ordre de préférence mais par ordre chronologique. 

MarilynMonroe
Entre Eve et Chéri je me sens rajeunir, son rôle de blonde ingénue s’installe.

Après des débuts difficiles où elle alterne entre petits rôles anecdotiques et mannequinat, Marilyn Monroe apparaît en 1947 dans Quand la ville dort (The Asphalt Jungle) de John Huston. Le réalisateur Joseph L. Mankiewicz lui offre ensuite un petit rôle dans Eve (All About Eve) où Marilyn, débutante, doit faire face à l’immense star Bette Davis. Le film est un succès et permet à l’actrice de négocier un contrat plus intéressant avec la 20th Century Fox. Nous sommes alors en 1950 et Marilyn passe de “figurante” à second rôle avant de connaître la consécration à peine trois ans plus tard. Deux ans après, elle fait face à une autre star du cinéma : Cary Grant dans Chérie, je me sens rajeunir (Monkey Business) de Howard Hawks. Ce rôle va installer l’icône Marilyn Monroe. En effet, il s’agit de l’une de ses premières apparitions pour un rôle en blonde platine. Elle joue une secrétaire naïve qu’un Cary Grant, ramené à l’état de jeunesse, séduit et amène faire une balade en voiture. Son personnage de blonde sulfureuse et ingénue s’installe peu à peu pour rester, jusqu’à aujourd’hui. 

Les démons s’éveillent la nuit (Clash by Night) de Fritz Lang, 1952

Après dix ans d’absence, Mae Doyle revient dans sa ville natale. Elle se marie avec Jerry, un marin-pêcheur, qu’elle trompe avec le troublant Earl.

Bien que présenté comme un film noir, Les démons s’éveillent la nuit de Fritz Lang s’apparente en vérité davantage à un mélange de drame et de romance. Adaptée d’une pièce de théâtre de Cliffort Odets, cette œuvre offre pour la première fois à Marilyn l’occasion de voir son nom apparaître au générique, avant même le titre du film. Pour lui faire face, Lang engage Keith Andes qui joue son petit ami. Monroe partage également plusieurs scènes avec Robert Ryan et Barbara Stanwyck. Bien que son rôle soit encore un rôle secondaire, l’actrice marque les esprits avec un rôle ajouté par Fritz Lang au scénario original. 
Marilyn joue Peggy, une jeune femme très loin du cliché de la “poule de luxe” que Monroe endosse dès ses premiers films. La psychologie de Peggy est beaucoup plus complexe et son style vestimentaire est à des années lumières des longues robes à paillettes. Elle porte des jeans, travaille dans une conserverie de poisson, se permet de frapper son petit ami et refuse de se laisser dicter sa conduite par les hommes. Elle est une jeune femme moderne et pleine d’énergie à laquelle Monroe parvient parfaitement à donner vie. 
Bien que sa relation avec le réalisateur aie apparemment été quelque peu houleuse (la presse perturba énormément le tournage en cherchant à tout prix à capturer des clichés de Monroe), il semble que Fritz Lang ait été le premier à offrir à Marilyn un véritable rôle permettant de montrer ses talents d’actrices. C.D

Les Hommes préfèrent les blondes (Gentlemen Prefer Blondes) d’Howard Hawks, 1953

Lorelei et Dorothy, deux danseuses vedettes, partent à Paris. Mais elles sont suivies de près par un détective privé, employé par le futur beau-père de Lorelei.

Avec Les Hommes préfèrent les blondes, Howard Hawks s’attaque pour la première (et dernière fois) au style de la comédie musicale. Dans un premier temps, Marilyn n’était pas envisagée pour le film. C’est Betty Grable qui devait jouer ‘la blonde’ du duo. Mais face au succès de Niagara d’Henry Hathaway (sorti en janvier 1953), la Fox offre le rôle à Marilyn. Hawks retrouve donc l’actrice pour la deuxième fois après Chérie je me sens rajeunir (1952) et l’expérience n’est pas de tout repos pour lui ; Marilyn ne cesse de vouloir retourner les scènes et cela entraîne un certain retard. Particulièrement impliquée dans ce rôle, elle aurait même suivit toutes les représentations du spectacle de Broadway Les Hommes préfères les blondes, et ce, pendant un mois !Contrairement à certaines idées reçues (issues principalement des quelques scènes restées cultes) le personnage de Marilyn est plus complexe qu’il n’y paraît. Ou en tout cas, plus intelligent ! À chaque fois qu’une situation montre sa naïveté, elle parvient à retourner l’opinion du spectateur.trice avec un mot d’esprit ou une idée étonnante. De même, à la fin, elle avoue à son beau-père qui ne l’aime guère “Je peux avoir de l’esprit quand c’est important, mais la plupart des hommes n’aiment pas cela ”. Lorelei aime les diamants parce qu’ils durent pour toujours contrairement à la jeunesse qui finit par se fâner. Elle n’aime pas le comportement de son amie Dorothy car celle-ci profite trop de la vie en draguant n’importe quel homme. D’une certaine façon, le personnage de Monroe semble angoissé par le futur, l’idée de vieillir et de se retrouver seule. Elle n’est pas seulement une blonde matérialiste et tout cela apparaît clairement grâce aux dialogues et à la réalisation de Hawks mais aussi, grâce aux variations subtiles dans le jeu de Marilyn. C.D.

Comment épouser un millionnaire (How to Marry a Millionaire) de Jean Negulesco, 1953

Trois mannequins new-yorkais prennent la décision de tout mettre en œuvre afin d’épouser chacune un millionnaire.

1953 est une grande année pour Marilyn. Après Niagara et Les Hommes préfères les blondes, elle se retrouve sous la direction de Jean Negulesco pour le rester célèbre Comment épouser un millionnaire. C’est le producteur Darryl Zanuck qui décide d’engager l’actrice, agréablement surpris du talent et du sérieux qu’elle a montré pour le film d’Howard Hawks. Il sait aussi que le trio Bacall-Grable-Monroe peut lui apporter un énorme succès au box-office et il en a besoin pour ce film qui est le premier à utiliser une technique toute nouvelle à l’époque, le CinemaScope. Le pari est gagné. Le film connaît le succès public et est même nommé dans plusieurs compétitions.
Marilyn y interprète Pola, une mannequin qui, comme ses deux amies, cherche à épouser un homme riche. Sa particularité ? Elle est myope comme une taupe et particulièrement complexée par les lunettes qu’elle doit porter. Ce petit détail apporte beaucoup au film et au personnage de Monroe qui est de très loin, le plus drôle. Par moment, elle parvient même à voler la vedette à Lauren Bacall et plus encore, à Betty Grable. 
Il est facile de rapprocher Comment épouser un millionnaire et Les hommes préfèrent les blondes qui sont deux comédies très efficaces tournant autour du thème de l’amour et de l’argent. Et dans les deux cas, Marilyn joue une jeune femme naïve, profitant d’une manière ou d’une autre de son physique avantageux pour parvenir à ses fins. Mais ces œuvres sont surtout celles qui vont finir d’asseoir la popularité de l’actrice auprès du public, tout en faisant comprendre aux réalisateurs qu’elle n’est pas juste un joli visage mais également, un talent brut qui a encore beaucoup de choses à montrer. C.D.

Pendant la promotion du film, Marilyn Monroe fait la couverture de nombreux magazines. Celle de Paris Match titrait en juillet 1953 “Le cinéma va-t-il disparaître ?” Cinquante ans plus tard, nous pouvons vous répondre que non.

Rivière sans retour (River of no Return) d’Otto Preminger, 1954

En 1875, Matt Calder, un ancien repris de justice veuf, vient chercher Mark, son fils âgé de neuf ans, dans un camp de chercheurs d’or. C’est Kay, une chanteuse de saloon, qui avait pris l’enfant sous son aile.

River of no Return est la deuxième incursion de Marilyn dans le genre du western. En 1948 elle tournait dans Alerte au Ranch (Green Grass of Wyoming) pour lequel elle n’était pas créditée. En 1954, son nom apparaît au générique et qui plus est, elle tourne avec l’un des meilleurs réalisateurs de l’époque, Otto Preminger, et avec l’un des plus grands acteurs, Robert Mitchum. À ce moment-là, Marilyn atteint des sommets de popularité, mais pour asseoir davantage son statut, Darryl Zanuck décide de lui donner un rôle plus sérieux. D’après certaines sources, c’est elle qui aurait demandé à travailler avec Robert Mitchum, un choix judicieux tant l’alchimie du duo porte le film. 
Kay est une chanteuse de saloon protectrice et dévouée qui rêve d’une vie meilleure. Mais contrairement à ses précédents films, Marilyn ne joue pas ici les jeunes femmes naïves. Tantôt en robe colorée pour chanter devant des soulards, tantôt en jean pour descendre une rivière tortueuse, Kay est une femme forte malgré ses quelques moments enfantin. Si elle est parfois rêveuse, elle sait aussi se montrer plus dure et les disputes entre elle et Matt (Robert Mitchum) jalonnent le film. 
La Rivière sans retour est sans doute le premier film à offrir un rôle aussi profond à Marilyn et une fois de plus, l’actrice s’implique énormément dans le projet. En plus de jouer, elle chante les quatre chansons du film. Elle aurait également demandé un droit de relecture du scénario. Enfin – mais ce n’est pas rien ! – elle aurait manqué de se noyer et se serait blessée à plusieurs reprises en réalisant des cascades. C.D.

Arrêt d’autobus (Bus stop) de Joshua Logan, 1956

Bo Decker, un jeune cow-boy du Montana, quitte pour la première fois sa région dans l’espoir de remporter un rodéo et ramener avec lui la femme de sa vie. Il rencontre Belle dans un cabaret et décide de l’épouser de force. 

Un film sur le consentement avant l’ère Metoo ? Ce serait un peu exagéré pour parler d’Arrêt d’autobus où la jeune Belle tombe amoureuse un peu malgré elle d’un cow-boy lourdaud et totalement immature. Alors que celui-ci est directement sous le charme de la beauté sulfureuse de Belle, elle va tout faire pour lui échapper. Bo (Don Murray, dans son premier rôle) la traite littéralement la jeune femme comme une jument : il tente de l’attraper à plusieurs reprises avec son lasso, ne demande jamais son avis, pense qu’elle est heureuse qu’il ait jeté son dévolu sur elle. En face, Marilyn oscille entre femme combative et proie, amoureuse un peu naïve. Elle veut quitter son bar pour partir réussir sa vie à Hollywood. 

La danse un peu maladroite et la chanson que Belle donne en spectacle chaque soir peut renvoyer à une autre femme fatale : Gilda (Charles Vidor, 1946). Rita Hayworth y jouait une femme qui séduisait les hommes avec sa danse lascive et se défaisait de ses longs gants dans un effeuillage élégant. Ici, Belle n’en est que l’ombre, le cabaret n’est pas aussi luxueux et le public est fortement alcoolisé. Fatiguée, rêveuse et en petite tenue, elle se retrouve à découvrir l’amour dans les bras d’un malotrus qui l’admire et en fait une femme objet. En effet, à aucun moment, il voit la vraie Belle : une jeune femme désoeuvrée qui doit s’en sortir seule. Marilyn parvient ainsi à donner en nuance dans ce film vraiment pas subtile. 
Cette comédie légère, un peu oubliée aujourd’hui, est le fruit d’un nouveau contrat qu’elle a réussi à négocier avec la 20th Century Fox après le succès de Sept ans de réflexion (The Seven Year Itch, Billy Wilder, 1956). C’est également sur ce tournage qu’elle fait appel aux services de Paula Strasberg qui la conseille sur ses performances d’actrice, au grand dam des équipes des films. Elle pouvait ainsi retourner plusieurs fois la même scène si Paula n’était pas satisfaite du résultat. M.M.

Certains l’aiment chaud (Some Like it Hot) de Billy Wilder, 1959

En 1929, en pleine prohibition, à Chicago, Joe et Jerry, deux musiciens, échappent à une rafle de la mafia locale. Pour échapper à une mort certaine, ils décident d’intégrer un groupe de musiciennes de jazz, réservée uniquement aux femmes. En route pour Miami, les deux hommes se travestissent et tentent de s’intégrer tant bien que mal à l’équipe féminine. 

Marilyn Monroe joue Sugar – elle est habituée des prénoms atypiques qui la sexualise – une membre de la troupe de jazz féminine que rejoignent Joe et Jerry, interprétés par Tony Curtis et Jack Lemmon. Cette jeune femme, qui en a marre des musciens, car ils l’abandonnent dès qu’elle s’est livrée à eux, devient rapidement amie avec Joe/Josephine. Elle se confie à cet homme fou amoureux d’elle avec une honnêteté et une tendresse émouvante. Elle remporte le Golden Globe de la meilleure actrice dans une comédie en 1960 pour son rôle. 
Pourtant Marilyn ne voulait pas faire ce rôle, car après des personnages plus sombres et sérieux, Sugar est une nouvelle fois une jeune femme naïve et un peu bête qui se fait séduire facilement par Joe. Elle ne souhaite plus ce genre de rôle où elle ne se sent pas prise au sérieux. C’est son mari de l’époque, Arthur Miller, qui insiste pour qu’elle tourne Certains l’aiment chaud, et c’est également la perspective de jouer une nouvelle fois sous le regard de Billy Wilder (quatre ans auparavant elle avait fait Sept ans de réflexion) qui la persuadent. 

S’il s’agit d’un des plus gros succès de Marilyn, c’est aussi pour l’actrice le début de ses problèmes de santé. Outre une nouvelle fausse couche à la fin du tournage, elle prend depuis de nombreuses années beaucoup de drogues et est suivie par un psychiatre. Sa santé se détériore rapidement et elle devient plus instable, arrivant souvent en retard et étant plus exigeante sur ses prises. Elle perd pendant le tournage son amitié avec Tony Curtis, insupporté par son manque apparent de professionnalisme. M.M.

Les désaxés (The Misfits) de John Huston, 1961

Années 50, Reno, Nevada, capitale de l’industrie matrimoniale et des machines à sous.
Une jeune divorcée se lie d’amitié avec un groupe composé d’un cow-boy vieillissant, d’un mécanicien au cœur brisé et d’un cavalier de rodéo usé par le temps. Le petit groupe part chasser le cheval sauvage…

Le film maudit. C’est souvent comme cela qu’est désigné ce dernier film de Marilyn. Et pour cause, Clark Gable, qui interprète Gaylord, disparaîtra peu de temps après la fin du tournage ; Montgomery Clift décédera cinq ans plus tard après avoir difficilement tourné trois autres films. Quant à Marilyn, elle partira un an plus tard, âgée de seulement trente-six ans. 
À sa sortie, Les Désaxés fut boudé par le public et pourtant, il est aujourd’hui, l’un des films les plus appréciés dans la filmographie de l’actrice. Il faut dire que cet ultime rôle est sans nul doute celui dans lequel Marilyn montre toute l’étendue de son talent. C’est son mari de l’époque, Arthur Miller, qui écrivit ce personnage en s’inspirant justement de la vie amoureuse de l’actrice. Ainsi, Monroe joue Roslyn, une femme tout juste divorcée, déçue de la vie et de l’amour. Triste, déchirée, elle s’offre une parenthèse plus douce dans le Nevada sauvage aux côtés de Gaylord et de deux autres cowboys. Mais la joie retrouvée est de courte durée et bientôt, Roslyn décide de repartir, seule. La jeune femme est le centre de l’histoire, celui autour duquel toutes les actions et tous les personnages gravitent. Marilyn apparaît dans presque tous les plans et pourtant, elle n’a jamais semblé aussi naturelle devant une caméra. 

Roslyn est plus le plus beau rôle de Marilyn, sans doute parce que ce personnage est bien plus proche de sa vraie personnalité que l’était Lorelei dans Les hommes préfèrent les blondes ou Sugar dans Certains l’aiment chaud. Avec ce rôle écrit sur-mesure, Arthur Miller espérait sauver celle qu’il aimait de ses démons. Il échoua mais lui offrit un rôle inoubliable qui permit enfin au grand public de découvrir une parcelle de la vraie Marilyn. C.D.

Obligée de tourner un dernier film pour la Fox, Marilyn accepte après de nombreuses discussions de tourner dans un remake de Mon épouse favorite (My Favorite Wife, Garson Kanin, 1940). Ce film se nomme Something’s got to give et doit être réalisé par George Cukor. Le tournage est difficile et Marilyn est malade. Elle tourne quelques scènes, participe également à des séances photos mais son décès prématuré et de nombreux autres problèmes liés à la production, ne permettront jamais à George Cukor de terminer son film. Dans cette œuvre inachevée il ne reste que quelques photographes et rushs d’une trentaine de minutes

Quelques images des tests de Marilyn Monroe pour son dernier film inachevé, Something’s Got To Give
Camille Dubois et Marine Moutot
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