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Un petit chat noir tente de survivre dans un monde où toute vie humaine a disparu. C’était sans compter une mystérieuse inondation qui l’oblige à cohabiter avec des animaux sur une barque.
Le cinéaste lettonien Gints Zilbalodis réalise avec Flow son deuxième long-métrage. Il avait réalisé en 2019, seul, le film Away qui racontait déjà l’histoire d’un être qui devait survivre à une catastrophe. Il a reçu le Prix Contrechamps au Festival d’animation d’Annecy, ce qui lui a permis de proposer en 2024, toujours à Annecy, Flow. Cette fois-ci il s’entoure d’une équipe et comme il le dit si bien lui-même : “Comme mon personnage principal, mon penchant naturel est de travailler seul pour pouvoir contrôler tous les aspects de mon film. Mais je sens qu’il est temps pour moi de sortir de cette zone de confort et de m’entourer d’une équipe qualifiée qui saura m’accompagner pour enrichir cette aventure créative et narrative.”
Iels proposent une œuvre riche et intense, qui ne peut laisser indifférent et au cours de laquelle nous ressentons la détresse, la curiosité, le bonheur du félin. Nous sommes embarqué-es avec lui. L’image d’animation 3D très réaliste, le scénario, mais aussi la musique (très prenante et magnifique) créent une ambiance à la limite du fantastique. Prix du jury et du public au Festival d’Annecy et présenté à Un Certain Regard à Cannes cette année, Flow est une petite pépite.
Émouvante, l’histoire parle, qu’entre défiance et confiance, il faut s’entraider et apprendre à se connaître. Tous ces êtres très différents – capybara, lémurien, labrador, oiseau et autres créatures – doivent trouver leur place dans ce nouveau monde. La barque, métaphore de l’arche de Noé, est le centre, l’habitat, le lieu où l’on se retrouve. En plus de ne pas être de la même espèce, les habitants ont leur personnalité. Curieux, timide, tranquille… ces êtres ne réagissent pas pareil. Un peu comme nous, ils sont uniques. Sans parole, cette aventure est totalement immersive. Pas besoin de dialogue mal ficelé pour s’entendre et se regarder. Cette histoire de naufrage, que l’on pourrait dire de sauvetage, est une histoire dont le réalisateur tient à coeur, puisqu’un de ses premiers courts-métrages réalisé en 2012, Aqua, suivait déjà l’histoire d’un petit chat noir au prise avec les flots. “Flow” en psychologie représente un état où l’on est entièrement absorbé par ce que l’on fait, un état de concentration. C’est une immersion totale dans un autre univers que nous propose le cinéaste dont vous ne ressortirez pas entier-ère.
Catastrophe climatique, immigration, conflit entre les peuples, le film raconte tout cela mais, il peut également être pris comme une simple mais palpitante histoire d’aventure. C’est pour cette raison que Flow est accessible peut se regarder à n’importe quel âge. Il parle de notre monde actuel.
Tout au long du récit, l’importance de la présence humaine se fait sentir. Elle a laissé une marque indélébile, tant par l’art – de nombreuses statues, une ville engloutie majestueuse digne de Rome – que par des effets plus pervers : d’où vient cette inondation qui arrive sans crier garde ? Cette plaine engloutie, ancien vestige de la vie humaine, a-t-elle été sacrifiée au nom d’un autre idéal ? Est-ce un barrage créé pour permettre aux femmes et aux hommes de vivre mieux ailleurs, mais qui détruit tout sur son passage ? Le film n’apporte pas de réponse claire, le but n’étant pas là. Il parle de tolérance et d’entraide. Il montre que même sans parler le même langage il est possible de s’aider et de s’aimer.
Flow propose une vision humaniste de la nature et de ses habitants. La dureté est là, la peur aussi, mais surtout c’est l’attention des uns et des autres qui priment plus que tout.
Marine Moutot
Flow, le chat qui n’avait pas peur de l’eau
Réalisé par Gints Zibalodis
Aventure, Lettonie, 1h25
30 octobre 2024
UFO