[FESTIVAL D’ANNECY] Jour 4 : jeudi 12 juin

Comment nos choix et nos actions impactent directement la vie des autres et le cours des événements ? Voici une question que se posent de manières très différentes les deux films découverts pendant ce 4e jour.

L’officielle 9 : ChaO, de Yasuhiro Aoki
Dans un monde où humains et sirènes coexistent, Stephan, un employé de bureau ordinaire fait la rencontre de Chao, une princesse du royaume des sirènes. Qu’adviendra-t-il de leur improbable histoire d’amour ?

image tirée de ChaO

Ce film japonais, dont l’action se déroule à Shanghai, a reçu le Prix du Jury de cette nouvelle édition du festival d’Annecy. Sa plus grande qualité réside dans la beauté des décors qui s’inspirent d’artistes chinois. Les détails et la minutie des lieux offrent un côté magique. Le reste est plus difficile. Les personnages d’abord sont peu développés et Stephan est un anti-héros sans intérêt – même son passé est bâteau, déjà vu et un peu facile. Les personnages féminins inconsistants et seulement montrés dans leur rapport avec les hommes. Et ChaO, qui pourrait être une héroïne badass, est juste sujet à des crises de larmes quand Stephan la rejette. De l’autre côté, le sexisme imprègne le récit et empêche de réellement profiter de l’humour, volontairement poussif. Tout est dans l’excès. 

L’idée de parler des différences, des corps pas comme les autres et des relations entre les peuples plus importantes que les échanges commerciaux se perdent ainsi dans un film brouillon. Quant à l’idée de forcer un homme à se marier – cela semble une maigre vengeance pour toutes les femmes qui ont dû se marier de force à travers les âges – elle peine à nous convaincre, tellement Stephan est antipathique et peu respectueux.

L’officielle 3 : La mort n’existe pas, de Félix Dufour-Laperrière
Après un attentat armé raté au cours duquel Hélène abandonne ses compagnons, Manon, une de ses complices lors de l’attaque, revient la hanter. Ensemble, elles traversent une vallée fantastique, où métamorphoses, pouvoirs vénéneux et grands bouleversements viendront bientôt bousculer l’ordre des choses. Hélène devra revisiter ses choix, intimes et politiques, et les dilemmes qui les circonscrivent.

image tirée de La Mort n'existe pas

Pour son cinquième long-métrage, le réalisateur québécois aborde la question du militantisme et de ses limites. La mise en scène et les dialogues sont nourris par des symboles forts qui viennent remettre en question, sans cesse, les attentes du public. Les personnages prennent les couleurs du décors (ou s’en détachent fortement) et évoluent ainsi au fur et à mesure du récit. Les êtres humains font partie de la vie au même titre que la nature et les animaux, et leur action a des conséquences. Les longues discussions qu’Hélène a avec les autres protagonistes – en l’occurrence ses ami-es décédé-es – soulèvent des points cruciaux que toutes personnes se posent dans la lutte armée. Le militantisme jusqu’où ? Et pourquoi ? La mort pour permettre la vie ? Les répercussions ? Mais aussi la possibilité d’un avenir meilleur et plus heureux, où les humains se révolteraient contre les forces en puissance et où la Nature serait maîtresse. Et surtout, être capable d’aller jusqu’au bout. Accessible, malgré les questionnements durs qu’il expose, La mort n’existe pas est une œuvre intéressante et profonde.

Marine Moutot

Retour en haut