[CINÉMA] Ressortie des films de Mamoru Hosoda

Temps de lecture : 7 min

Le distributeur KMBO profite de l’été pour ressortir trois films du réalisateur nippon Mamoru Hosoda : La Traversée du temps (2006), Summer Wars (2010) et Les Enfants loups, Ame & Yuki (2012). En effet, le prochain film du cinéaste, Scarlet, sortira en France en décembre.
Les films de Hosoda sont des contes de fées qui transportent loin dans le Japon. N’hésitant pas à casser les codes, ces longs métrages s’ancrent dans le quotidien pour faire ressortir le fantastique. L’étrange est au détour d’une action qui semble anodine : une noix qui permet de remonter le temps dans La Traversée du temps, un homme mystérieux dans Les Enfants loups, ou encore une IA monstrueuse et joueuse dans Summer Wars.
Il montre aussi la campagne japonaise avec une bienveillance certaine et la dépeint comme accueillante. L’écologie, même si ce n’est pas au centre du récit, est ainsi toujours abordée.
Si vous souhaitez prolonger l’expérience, nous vous conseillons également Le Garçon et la Bête.

La Traversée du temps (2006) – à partir de 9 ans

Makoto n’est pas maladroite, sauf le jour où elle tombe sur une noix dans le laboratoire de son lycée. À partir de là, elle réalise qu’elle peut remonter dans le temps et changer le cours des événements. Sans se douter que chaque saut peut avoir des conséquences, elle modifie son histoire et celle de ses camarades en toute insouciance, jusqu’au moment où le destin la rattrape.

Le cinéaste japonais réussit à montrer, sans complexité, les modifications du temps à travers le regard d’une jeune lycéenne. Il aborde ainsi les conséquences de nos choix sur le cours de la vie. L’énergie de son héroïne déborde dans sa mise en scène qui mène tambour battant le récit avec burlesque et émotion.
Impossible de ne pas s’attacher aux différents personnages, et en particulier à Makoto, qui utilise sans cesse son nouveau pouvoir pour échapper aux situations qui la mettent mal à l’aise : une déclaration d’amour, aider un·e ami·e, avoir de meilleures notes…

Indéniablement, le film pose la question de la responsabilité. La relation qui se tisse entre Makoto et son ami Chiaki dessine, sans jamais tomber dans le didactisme, la confrontation entre le libre arbitre et la fatalité. Avec beaucoup d’humour, on voit la jeune Makoto essayer de changer le cours des événements — en vain. L’émotion gagne le film à la fin et nous touche profondément. Avec une animation très belle, vive, et une bande-son originale, La Traversée du temps nous transporte.

Summer Wars (2010) – à partir de 10 ans

Dans le monde d’Oz, plateforme virtuelle, il est possible de tout faire et d’être n’importe qui. C’est naturellement pour cela que des millions de personnes ont rejoint cet univers afin de gérer leur vie plus facilement.
Kenji, un étudiant passionné de mathématiques, est invité par l’une de ses camarades, Natsuki, à se faire passer pour son petit ami lors d’une réunion de famille. Mais pendant la nuit, il craque un code, ce qui déclenche une brèche dans la sécurité du monde d’Oz. Un virus s’empare peu à peu de milliers de comptes, semant la panique au Japon.

Le cinéaste utilise le monde d’Oz pour créer un univers complètement fou, où tout devient possible. Il ira encore plus loin avec le monde d’U dans Belle. En référence au livre et au film Le Magicien d’Oz, ce monde idyllique bascule dans le chaos à cause du virus informatique « Love Machine ». Cet avatar maléfique cherche à s’amuser — et quoi de mieux que de provoquer le chaos dans le monde réel en s’emparant de toujours plus de logiciels.

Mamoru Hosoda explore ici les liens étroits entre la réalité et le virtuel, qui contrôle de plus en plus nos vies. Le récit illustre bien notre dépendance aux réseaux sociaux et au besoin de rester connecté aux autres. Les limites de la technologie sont aussi grandes que l’ingéniosité et la solidarité de cette famille matriarcale, où l’on se serre les coudes malgré les différences, dans lequel Kenji plonge malgré lui.
Avec, une fois encore, beaucoup d’humour et de burlesque, le réalisateur nous invite à nous interroger sur notre monde et notre rapport aux autres.

Les Enfants loups, Ame & Yuki (2012) – à partir de 7 ans

Yuki raconte l’histoire de sa mère, Hana, qui l’a élevée seule avec son frère, Ame. C’était une jeune étudiante quand elle a rencontré Ookami, dont elle est tombée amoureuse. Il lui révèle qu’il est le dernier être d’une espèce disparue : un homme-loup. Malgré cette différence, elle l’aime encore plus.
Mais Ookami meurt à la naissance d’Ame, laissant Hana seule. Elle décide alors de quitter la ville pour se réfugier à la campagne, loin du regard indiscret des humains.

Le cinéaste parvient à montrer tout l’amour d’une mère pour ses enfants, malgré les difficultés et les différences. Ces enfants-loups, qui changent au gré de leur humeur, ne sont à aucun moment montrés comme des êtres monstrueux. Nous les voyons à travers le regard d’une mère bienveillante, qui souhaite le meilleur pour eux. Le récit parle de la confrontation à la différence et de la manière de l’habiter dans sa propre chair. Chaque enfant choisit son chemin, sa route, Hana n’étant là, au final, que pour leur offrir la possibilité de s’exprimer et de se découvrir par eux-mêmes.

En revisitant le mythe du loup-garou, Mamoru Hosoda explore la dualité en chacun de nous et dédramatise cette créature autrefois terrifiante. Ici, les enfants explorent leurs émotions, mais aussi leurs conflits, au rythme de leurs transformations. De plus, leur animalité est abordée du point de vue de la nature. Le rapport à ce qui nourrit tant les âmes que les corps est essentiel dans ce film, qui parle de la campagne à la fois comme d’un lieu de recueillement et d’un lieu à défendre.

Marine Moutot

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