Ce vendredi, nous vous parlons de : Ma vie avec John F. Donovan, Rebelles, Mon bébé, Quand je veux si je veux, La petite fabrique de nuages et Depuis Mediapart.
Ma vie avec John F. Donovan : Début des années 2000 : Rupert Turner – jeune collégien maltraité par ses camarades – voue une admiration sans bornes à John F. Donovan, acteur de sitcom sur le point de devenir un jeune premier du 7ème art. Suite à un premier échange de lettres, Rupert et John entament une correspondance qui s’étalera sur plusieurs années et jusqu’à la mort de ce dernier. Lors d’une interview donnée dix ans plus tard, Rupert se souvient.
Que dire ?… Que dire de Ma vie avec John F. Donovan, dernier film de Xavier Dolan, cinéaste pas encore trentenaire mais devenu au cours de ces dernières années un des plus grands cinéastes contemporains. Il suffit ainsi de se remémorer le marivaudage charmant des Amours imaginaires, de revenir à la maestria claustrophobe et angoissante d’un Tom à la ferme ou encore de se laisser embarquer par la poésie romanesque d’un Laurence Anyways pour s’en convaincre. Et pourtant…. Et pourtant voilà là un fabuleux plantage…
Ceci n’est pas un secret, la conception de Ma vie avec John F. Donovan a été particulièrement difficile : Jessica Chastain coupée au montage, multiples remaniements du script, présence d’une production américaine ressentie comme particulièrement intrusive pour ce cinéaste d’ordinaire habitué à tout diriger d’une main de maitre sur ses tournages… Bref autant de péripéties qui sont venues impacter le résultat final et qui transparaissent par un sérieux manque de fluidité généralisé. Toutefois et même si le film s’emmêle les pinceaux à vouloir jongler entre le parcours des deux protagonistes et ses différentes temporalités, plus d’un problème de rythme, c’est ici un sérieux manque de substance qui prévaut.
Ainsi, et malgré tout son talent, on a souvent reproché au style Dolan une certaine vacuité et une grandiloquence (des sentiments, de la mise en scène…) qui se retrouvent ici malheureusement exacerbées. Suivant cette malheureuse impulsion qui l’avait conduit à conclure Mommy sur une note particulièrement pompeuse, Dolan semble chercher à agrémenter son fourbi instable d’une émotion facile et manufacturée qui tourne hélas au ridicule. Au travers de la destinée tragique de son héro, Ma vie avec John F. Donovan voudrait sans nul doute passer pour un grand film romantique à la fois porté sur l’ambition et l’injustice quand il n’est en réalité que le récit terriblement vain de (petits) garçons caractériels au complexe d’Œdipe mal digéré. Et si toutefois le segment consacré à John F. Donovan (Kit Harrington, pas mal en acteur dépressif) aurait pu être intéressant, il est sans cesse diminué et parasité par les interventions de Rupert (Jacob Tremblay, en sur-jeu permanent), gamin absolument insupportable et ingrat qui – warning – pourra éventuellement provoquer chez vous d’irrépressibles pulsions meurtrières.
Au final avec Ma vie avec John F. Donovan, Dolan semble avoir eu les yeux plus gros que le ventre en se laissant dépasser par les moyens accordés par ce type de production qui sont hélas venus nourrir à excès ses élans les plus malhabiles. Ayant depuis déjà terminé son film suivant au Québec, on ne pourra qu’espérer qu’en revenant sur sa terre natale, le cinéaste aura su regagner son mojo pour nous transporter bientôt de nouveau. M.P.
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Rebelles : Sandra, ex-miss Nord-Pas-De-Calais partie 15 ans dans le sud revient à Boulogne-Sur-Mer. Sans formation diplômante, elle est embauchée à l’usine de conserve de la ville. Un soir elle se fait agressée par le contremaître. Elle se défend et le tue accidentellement. Deux de ses collègues assistent à la scène. C’est le début des ennuis pour les trois femmes. Cécile de France, Yolande Moreau et Audrey Lamy forment un trio fracassant dans cette comédie sociale peu ordinaire. Humour trash, girl power, ambiance boite de conserve et coups de casseroles dans la tronche, Rebelles décoiffe et amuse. Le western débarque à Boulogne-Sur-Mer et ça tire dans tous les coins. Les situations s’enchainent sans nous laisser de répit. Et c’est là que réside l’efficacité du film. Jamais il ne s’attarde sur des romances inutiles ou des dialogues futiles. Mais si le ton est à la rigolade, une autre réalité perle les péripéties de nos trois hardies compères : le chômage, les obstacles à la réinsertion professionnelle, les agressions physiques et sexuelles envers les femmes, la difficulté de joindre les deux bouts à la fin du mois. Le film énonce ces problèmes de société en toile de fond et peint le portrait de femmes vaillantes, qui encaissent et renvoient la balle. À l’instar de Les Invisibles (également avec Audrey Lamy) Rebelles est une ode à la solidarité et à la femme, une comédie intelligemment écrite sur laquelle le genre devrait prendre exemple. C.L.L.
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Mon Bébé : Le nouveau film de Liza Azuelos, réalisatrice entre autres de Dalila et LOL, est un long-métrage léger et sans prise de tête. Sandrine Kiberlain y interprète une mère dont la dernière fille, Jade, va bientôt partir pour le Canada. Cette mère investit dans sa famille, qui en a oublié sa propre vie, essaye de capter les derniers moments de sa relation avec sa fille, avant de se retrouver seule et de devoir se réinventer. Le sujet est traité avec une certaine justesse et émotion. Nous sommes souvent touchées devant le désespoir réel de cette maman qui vit son premier abandon. Grande gueule, toujours une répartie forte, Héloïse ne vit que pour et par ses enfants. En flash-back nous voyons ses tentatives de rencontre avec d’autres hommes, mais toujours ce besoin de retourner vers ses enfants. Ces retours en arrière sont d’ailleurs assez dérangeants, comme si une femme n’avait le choix entre les hommes et ses enfants. Cette vision montrée durant tout le récit m’a posé problème. Le sujet a beau être émouvant, il est rempli d’un trop-plein de bons sentiments et laisse le spectateur rapidement assez indifférent au peu de péripéties qu’offre le récit. L’hymne à cette mère, pleine de qualités, et une actrice brillante ne suffisent pas. De plus, l’usage de la musique qui accentue un peu le pathos rende l’ensemble assez stérile. Une mise en scène classique, des scènes plutôt bien écrites : un sentiment de LOL qui montre l’autre côté du miroir : après les ados, les parents. Le scénario alterne entre un amour naissant – l’histoire d’amourette adolescente qui fait sourire – et un amour envahissant, mais tendre – celui d’une mère pour ses enfants. Quelques moments font sourire, on ne ressort ni déprimé.e ni bien de Mon Bébé juste dubitatif devant ce que nous venons de voir. Un moment agréable qui glisse sur le spectateur. Nous laissant, comme après la lecture d’un livre sympathique, aucun souvenir marquant. M.M
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Quand je veux si je veux : Le dispositif est simple mais le propos est fort. Quand je veux si je veux, c’est un hymne à la liberté de jouir de son corps tout droit venu des années 60 et de leur slogan choc. Et c’est effectivement un voyage historique que nous propose le documentaire, des sixties à nos jours, soulignant qu’il ne faut pas oublier que le droit à l’IVG, il faut continuer à lutter pour le garder, peut-être plus dans la rue mais en parlant de nos expériences, en exprimant nos interrogations, en demandant à avoir des lieux d’accueil et d’écoute. Eh oui, en Pologne, le droit à l’IVG n’existe plus depuis 1993. Eh oui, en Espagne, depuis 2009, ce droit est fortement remis en cause. En France, ce n’est pas parce que nous avons ce droit que c’est une démarche facile à faire. C’est en retraçant le parcours de plusieurs femmes de tous âges et leurs différentes expériences que les quatre réalisateur.trice.s (trois hommes et une femme !) mettent en lumière cet aspect. Ces femmes sont filmées dans un parc, un lieu neutre et naturel, car il est important de libérer cette parole dans l’espace public. Les témoignages s’enchaînent, particulièrement touchants. Et comme le souligne une spectatrice lors du débat, c’est pour elle la première fois qu’elle entend parler d’avortement aussi librement et avec autant de détails. Ce n’est pas la seule ! On manque d’informations à ce sujet (clairement tabou). Alors Quand je veux, si je veux apporte sa pierre à l’édifice et lève le voile sur ce non-dit permanent. Et en faisant cela, il pense même à contredire les idées préconçues d’un avortement comme “moyen de contraception” ou de “jeunes femmes irresponsables” y ayant recours.
Suite à cette projection au Brady, un débat intéressant a eu lieu en présence de deux des réalisateurs, d’une des femmes ayant témoigné ainsi que d’une gynécologue. Lors de cet échange, nous apprenons que la loi autorise un médecin à refuser de faire un avortement. Par ailleurs, il y a de moins en moins de personnes formés à l’avortement chirurgical et les praticiens ainsi de plus en plus recours à l’IVG médicamenteuse (même après 14 semaines de grossesse !). M.K.
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La petite fabrique de nuages : Ce programme de cinéma d’animation destiné aux plus jeunes nous emmène dans un tour du monde de l’animation (Mexique, Russie, Brésil, Canada, Grande-Bretagne) à travers cinq courts métrages sans paroles. Regroupant dessin et art de la marionnette, il laisse surtout une grande place à la musique (jazz, classique). L’animation, principalement numérique, n’est malheureusement pas très satisfaisante et les courts métrages choisis, bien que sympathiques et souvent poétiques, manquent un peu d’originalité. Le travail sur la peur, l’amitié et le fait de grandir est tout de même intéressant. M.K.
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Depuis Mediapart : La réalisatrice Naruna Kaplan de Macedo nous plonge dans les coulisses du journal d’investigation en ligne, Mediapart. Suivant la chronologie de l’élection présidentielle de 2017 (l’avant, le pendant et l’après), elle fait escale sur les nombreux moments clefs de cette année : l’affaire Fillon, l’affaire Baupin, les Football Leaks, les financements libyens, l’affaire Weinstein… L’enquête s’arrête peu de temps après l’élection de Macron à la présidence. Discussions (plus ou moins formelles) avec Edwy Plenel et d’autres journalistes pendant les nuits à la rédac, la caméra est partout dans les locaux de Mediapart parfois accompagnée par la voix off de la réalisatrice. Un bon documentaire pour découvrir ce qu’est le journalisme d’investigation. M.K.
Le blog Mediapart de la réalisatrice, Naruna Kaplan de Macedo : https://blogs.mediapart.fr/naruna-kaplan-de-macedo/blog
Et puis c’est aussi une réalisatrices de l’Acid alors si vous voulez lire son avis sur les films de la programmation cannoise, c’est par là : https://www.lacid.org/fr/personnes/naruna-kaplan-de-macedo
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Manon Koken, Clémence Letort-Lipszyc, Marine Moutot et Marine Pallec
Ma vie avec John F. Donovan
Réalisé par Xavier Dolan
Avec Kit Harington, Jacob Tremblay, Susan Sarandon
Drame, Canada, 2h04
13 mars 2019
Rebelles
Réalisé par Allan Mauduit
Avec Cécile de France, Yolande Moreau, Audrey Lamy
Comédie, France, 1h27
13 mars 2019
Mon Bébé
Réalisé par Lisa Azuelos
Avec Sandrine Kiberlain, Thaïs Alessandrin, Victor Belmondo
Comédie dramatique, France, 1h27
13 mars 2019
Quand je veux si je veux
Réalisé par Susana Arbizu, Henri Belin, Nicolas Drouet et Mickaël Foucault
Documentaire, Cambodge, France, 1h13
13 mars 2019
La petite fabrique des nuages
Programme de courts métrages réalisé par Gildardo Santoyo Del Castillo, Vladislav Bayramgulov, Mark C. Smith, Ilenia Cotardo et Marco Nick
Animation, Mexique, Russie, Canada, Brésil, Grande-Bretagne, 46 min
A partir de 3 ans
13 mars 2019
Depuis Mediapart
Réalisé par Naruna Kaplan de Macedo
Documentaire, France, 1h40
13 mars 2019