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Et c’est parti pour une nouvelle édition ! Le Festival Lumière de Lyon est de retour pour sa quinzième année. Entre restaurations, séances évènements, films classiques et cultes, découvertes, avant-premières et master class, on vous parle de nos déambulations à travers les salles lyonnaises et les différents lieux de festivités !
Mardi 17 octobre
La veille nous avait offert une belle journée cinématographique. Bien que ce mardi 17 ne soit pas aussi chargé, nous ne doutons pas de la qualité du film que nous allons découvrir dans quelques heures.
Cela dit, notre emploi du temps du jour a été quelque peu chamboulé. Nous avions prévu d’assister à l’une des avant-premières organisée par le Festival Lumière en découvrant Le Cercle des Neiges, nouveau film de Juan Antonio Bayona qui sortira sur Netflix le 15 décembre 2023. Le film retrace l’histoire vraie d’une équipe de rugby condamnée à survivre dans le froid glacial des Andes, après le crash de l’avion qui les transportait. Ce n’est pas la première fois que ce drame inspire les cinéastes ; nous nous souvenons notamment du film Les Survivants réalisé par Frank Marshall en 1993 et dont nous gardons un bon souvenir. Nous sommes donc assez curieuses de voir comment Juan Antonio Bayona a décidé de raconter cette même tragédie.
Malheureusement pour nous, nous ne pourrons pas assister à la séance. Nous avons mal calculer nos temps de trajets entre deux salles (un grand classique pendant ce festival lyonnais) et nous nous retrouvons ainsi face à un choix : découvrir Le Cercle des Neiges au Pathé Bellecour ou découvrir en avant-première le nouveau documentaire de Julia Kuperberg et Clara Kuperberg à l’Institut Lumière. Pour être tout à fait honnêtes, nous ne réfléchissons pas très longtemps car s’il y a bien une chose que nous attendons depuis l’annonce de la programmation du Festival, c’est le film sur Dorothy Arzner réalisé par les sœurs Kuperberg !
Nous arrivons avec un peu d’avance à l’Institut Lumière, rue du Premier Film. Le village grouille de festivaliers venus faire des emplettes ou boire un verre entre deux films. Nous pensons un temps à nous installer à une table également mais nous voyons déjà la file se former pour notre séance de 14h. Ni une, ni deux, nous allons nous placer derrière les autres spectateurs et spectatrices pour finalement pénétrer dans la salle peu de temps après. Nous connaissons bien l’endroit pour y travailler régulièrement tout au long de l’année mais c’est la première fois que nous allons voir le résultat de la restauration des deux salles de cinéma situées au sous-sol de la villa Lumière. Et nous sommes immédiatement conquises ! Le hall d’entrée est illuminé par un énorme lustre et le tout est décoré dans un style art déco. Il en est de même pour les deux petites salles dont les sièges sont particulièrement confortables !
À 14h, la séance démarre par une présentation de Clara et Julia Kuperberg, des habituées du festival. En effet, en 2020, elles étaient venues présenter leur documentaire sur Jack Lemmon (Jack Lemmon, une vie de cinéma) et en 2021, celui sur Ida Lupino, Gentlemen and Miss Lupino. Pour leur nouveau projet, les réalisatrices et productrices se sont intéressées à la réalisatrice américaine Dorothy Arzner ; une femme badass selon leurs propres dires ! En effet, on ne peut être qu’admiratives en découvrant le parcours de cette femme (seule réalisatrice des années 1930) ouvertement homosexuelle qui débute comme monteuse et scénariste avant de passer derrière la caméra pour réaliser une quinzaine de films. D’abord rattachée à la Paramount, elle quitte le système des studios pour gagner davantage en indépendance. Inventeuse de la perche au cinéma, Arzner est également celle qui fera tourner son premier film parlant à Clara Bow, une histoire qui a fortement inspiré un certain Damien Chazelle pour Babylone.
Dorothy Arzner est donc une personne passionnante que l’Histoire du cinéma a pourtant oublié et, nous le comprenons très bien en voyant le documentaire de Clara et Julia Kuperberg ; les intervenants et intervenantes sont peu nombreux (même si on note tout de même l’apparition de Francis Ford Coppola, qui fut l’un des élèves de Dorothy Arzner). Cela démontre bien la difficulté de trouver des “spécialistes” capables d’évoquer la réalisatrice et son travail. De même, si la voix de Dorothy Arzner vient parfois parsemer le récit, ce sont surtout des photos que nous donnent à voir la cinéaste. Comme l’expliquent les sœurs Kuperberg, il ne reste aucune vidéo (ou très peu en tout cas) de cette grande dame. Elle a été oubliée, effacée et ce, malgré ses succès (Dance, Girl, Dance, 1940), son avant-gardisme et son apport important au cinéma.
Nous ne sommes pas déçues de ce film que nous attendions beaucoup. Au contraire, les lumières à peine rallumées, nous mourrons d’envie de courir au village du Festival pour trouver quelques films de cette grande dame dont on vient de nous compter la vie et le travail. Mais avant d’aller dépenser notre argent, nous avons le plaisir de voir revenir les réalisatrices pour un petit temps d’échange.
Julia et Clara Kuperberg nous expliquent alors que ce documentaire leur a demandé un an de travail et qu’il fut l’un de leur projet le plus difficile, justement à cause du manque de matériaux ou de personnes ayant assez des connaissances. Elles nous expliquent également que lorsqu’elles réalisent un documentaire, leur but est de s’effacer au service de l’artiste pour que le spectateur ait envie de voir les films. Le pari est réussi, une fois de plus ! Mais à vrai dire, les deux réalisatrices nous ont déjà conquises depuis plusieurs années et, nous sommes donc ravies d’apprendre qu’un coffret regroupant leurs documentaires sur les femmes du cinéma pourrait voir le jour. Au détour d’une question, les cinéastes évoquent également leur prochain documentaire qui reviendra sur la carrière de Mary Pickford, actrice mais surtout grande pionnière à Hollywood.
Alors que nous sortons de la salle, nous avons l’occasion de féliciter Julia et Clara Kuperberg et d’échanger quelques mots avec elles, avant de filer au village du Festival situé dans le parc de l’Institut Lumière. Le lieu est rempli de DVD, de bouquins ou de divers goodies. Nous faisons un premier tour, puis un deuxième, regardant plusieurs jolis coffrets qui nous tendent les bras… Mais puisque nous avons déjà profité des soldes chez Carlotta quelques jours plus tôt, nous décidons de nous concentrer sur le travail de Dorothy Arzner. Malheureusement pour nous, un seul DVD est présent dans la boutique : Honor Among Lovers, sorti en 1931. Nous n’allons pas vous mentir, nous sommes déçues qu’il n’y ait pas plus de place offerte à la réalisatrice mises en avant par le documentaire des sœurs Kuperberg mais également par le Festival, il y a plusieurs années.
Nous nous rassurons en nous disant que cela est sûrement mieux pour notre porte monnaie et nous gardons en tête l’idée de trouver les autres films de la réalisatrice américaine.
Notre nouvelle journée de Festival se termine ici car toutes les autres séances qui nous intéressaient par la suite étaient déjà complètes.
C’est un mal pour un bien car nous avons encore pas mal de travail qui nous attend à la maison. Et puis parfois, il faut savoir se reposer pour profiter plus encore du reste du Festival !
Camille Dubois
Dorothy Arzner, une pionnière à Hollywood
Réalisé Clara Kuperberg et Julia Kuperberg
Documentaire, 53 min, 2023