[CINÉMA] Le Secret des mésanges

Image tirée du film Le Secret des mésanges

Temps de lecture : 8 min

Le nouveau film de Folimage — producteur notamment de La Prophétie des grenouilles de Jacques-Rémy Girerd ou de la série ARTE Tu mourras moins bête — est une merveille en papier découpé. Réalisé par Antoine Lanciaux, Le Secret des mésanges a été présenté en séance spéciale au Festival d’animation d’Annecy cette année.

Ce beau long-métrage n’est pas qu’une démonstration technique. La jeune héroïne intrépide, Lucie, le gros chien, l’oie récalcitrante Zerbinette et Yann, jeune homme très tranquille, partent à l’aventure. Sous la forme d’une enquête et d’une fouille archéologique, l’histoire nous plonge dans les origines de la famille de Lucie, qu’elle ne connaît pas. Château, forêt inquiétante, moulin brûlé et animaux en tout genre peuplent ce récit. Adaptée dès 6 ans, cette folle histoire ravira toute la famille !

Pourquoi voir le film ? 

Pour la technique d’animation : le papier découpé
Cette technique minutieuse rend les décors et les personnages tout simplement superbes par la simplicité des formes.
Dix mille feuilles de papier Canson — société basée en Ardèche — et près de deux cents personnes ont été nécessaires à la fabrication du Secret des mésanges. L’équipe artistique a ainsi construit plus de deux mille pantins pour les personnages et huit cent vingt-six décors.
Magnifique sur le plan visuel, le papier découpé rend aussi le film accessible et poétique. Sophie Roze, autrice graphique, a imaginé les pantins pour qu’ils soient à la fois réalistes et empreints de douceur. Réhaussés à la gouache et aux crayons de couleur, ils ont tous été réalisés à la main.
Évocation tendre de l’enfance, les personnages et les décors gagnent en profondeur grâce aux différentes couches de papier. Véritable hymne à la nature, les oiseaux, les animaux et la forêt rappellent sans cesse la beauté fragile de la faune et de la flore qu’il nous faut protéger.

Pour l’histoire sous forme de récit détective
Cette enquête familiale et archéologique est à la fois ludique et amusante. Lucie, 9 ans, n’a pas froid aux yeux : elle ose affronter les mystères de la tour que sa mère fouille. Le petit village de Bectoie devient le théâtre d’aventures captivantes.
Avec beaucoup d’humour — notamment grâce à l’oie Zerbinette —, l’histoire prend le temps de rendre ses personnages attachants, même si cela manque parfois d’émotions. Antoine Lanciaux s’inspire de sa propre histoire pour écrire celle de Lucie. Tandis que sa mère explore les ruines d’un vieux château, la fillette décide, elle aussi, de remonter le temps.
Les protagonistes ne sont jamais seul·es : humain·es et animaux s’entraident, notamment les fameuses mésanges du titre. Histoire de transmission et de partage, Le Secret des mésanges est une ode à l’amitié et à l’amour filial.

Entre émerveillement visuel et douceur narrative, Le Secret des mésanges rappelle avec tendresse que la curiosité, l’entraide et la nature sont les plus beaux héritages à transmettre aux générations futures.

Point d’histoire : la technique papier découpé 

Le papier découpé occupe une place singulière dans l’histoire du cinéma d’animation. Né au début du XX? siècle, il trouve ses premières formes avec Émile Cohl et ses silhouettes mouvantes de Fantasmagorie (1908), souvent considéré comme le tout premier film d’animation. Mais c’est la cinéaste allemande Lotte Reiniger qui en fait un véritable art : en 1926, elle signe Les Aventures du Prince Ahmed, chef-d’œuvre d’ombres et de lumière, et surtout premier long-métrage d’animation de l’histoire. Son travail minutieux sur les silhouettes découpées dans du papier noir influence durablement le cinéma mondial.

Dans les décennies suivantes, la technique se perfectionne et s’étend à l’Est, notamment en URSS et en Tchécoslovaquie, où des cinéastes comme Ji?í Trnka et Karel Zeman en explorent les potentialités poétiques et politiques. En France, elle inspire les générations d’animateurs et d’animatrices qui y voient une manière sensible de renouer avec la matière, le geste et la lumière.

À la fin du XX? siècle, alors que le numérique s’impose, le papier découpé résiste par son caractère artisanal et tactile. Michel Ocelot réalise Princes et Princesses (2000) et redonne vie à cette esthétique de la transparence et de la fragilité. Avec Le Secret des mésanges, Antoine Lanciaux inscrit son film dans cette lignée d’animations faites main, où chaque découpe devient un souffle de poésie et de vie.

Pour aller plus, je vous conseille : 
Découvrez les coulisses du film 

Des films en papier découpé :
Les Aventures du Prince Ahmed de Lotte Reiniger, 1926
Princes et Princesses de Michel Ocelot, 2000

Des héroïnes qui peuplent le cinéma français de ces dernières années :
Linda veut du poulet de Chiara Malta, Sébastien Laudenbach, 2023
Nina et le secret du hérisson d’Alain Gagnol, Jean-Loup Felicioli, 2023

Marine Moutot


Le Secret des mésanges
Réalisé par Antoine Lanciaux
Avec les voix de Marine Le Guennan, Yannick Jaulin
Aventure, animation, France, 1h17
Gebeka Films
Sortie le 22 octobre 2025
A partir de 6 ans

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